Coach Furlan

Ligue 2. FC Nantes. Successeur de Gernot Rohr, Jean-Marc Furlan, cède sa place à Baptiste Gentili. L'ancien adjoint de Michel Der Zakarian débutera dans son nouveau costume cet après-midi. La valse des entraîneurs nantais interpelle le milieu.

En posant ses valises à la Jonelière, Jean-Marc Furlan ignorait que Neuf semaines et demi trustait la cime du box-office à la salle vidéo du club. Neuf semaines et demi, c'est précisément la durée de son séjour sur les bords de l'Erdre. Et dire que Kim Basinger n'était même pas dans les murs pour la séance d'effeuillage... Averti de son limogeage quelques heures avant la réception de Bastia, l'ancien Strasbourgeois est pourtant devenu le héros d'un court-métrage pour un coach qui a découvert le FC Nantes début décembre, mais d'un interminable feuilleton pour les observateurs patentés des turpitudes nantaises.

Waldemar Kita a déjà usé deux entraîneurs cette saison et Baptise Gentili est le cinquième technicien de son gouvernement, moins de trois ans après la prise de pouvoir de l'homme d'affaires. Le propriétaire du club ne s'est pas fait que des amis dans le microcosme, mais Pascal Urano, le volcanique président sedanais, vole au secours de son alter ego. « Changer d'entraîneur est toujours une décision difficile. Sauf exception, ça n'amène jamais de résultats fantastiques. C'est le même principe qu'une greffe. Ça prend ou il y a rejet. Moins vous changez, mieux vous vous portez. J'aime bien Kita, c'est un passionné. La situation du club a dû interférer sur sa santé. Les gens n'imaginent pas que ça nous mange. »

Consommateur avéré d'entraîneurs, Pascal Urano admet que Jean-Marc Furlan a hérité d'un effectif « qu'il n'a pas choisi », avant de préciser que le technicien « n'avait qu'à refuser le poste s'il pensait que sa mission était impossible. » Au sein de la corporation, il est de bon ton de prendre la défense de ses semblables, en dépit des antagonismes, voire des manoeuvres de déstabilisation auxquelles se prêtent à l'occasion les techniciens. Lorgner le poste d'un collègue en difficulté, envoi de CV et coups de fil à l'appui est ainsi monnaie courante.

« Ce club part en vrille »

Quand un président actionne le siège éjectable, il écarte un homme, certes, mais il attaque aussi la fonction. Si Jean-Pierre Papin, qui a lui-même prit la succession de deux collègues en cours de saison (Guy Roux à Lens et Dominique Bijotat à Châteauroux) n'a pas souhaité s'exprimer sur le sujet, Michel Estevan, son homologue arlésien s'est montré plus prolixe. « Quand on vire un entraîneur, on fait un constat d'échec de la politique dirigeante. Tous ces changements, ça fait désordre. D'ailleurs, j'attendais qu'ils m'appellent (rires) ! Sérieusement, comment un entraîneur de renom peut-il venir à Nantes ? C'est choquant, on marche sur la tête » constate l'entraîneur provençal dont l'équipe s'était inclinée à la Beaujoire pour la première de Furlan. « Je pensais alors que c'était un nouveau départ pour le FC Nantes, mais on ne l'a pas laissé aller au bout de son travail. »

Comme tous les entraîneurs, réglementation oblige, Jean-Marc Furlan a paraphé un CDD de deux ans. L'aventure n'arrive qu'épisodiquement à son terme. « Même si on est protégé par notre contrat, on ne l'est plus dans le travail. J'ai toujours en tête cette phrase Roger Lemerre lors d'un stage d'entraîneur à Clairefontaine : « Quand vous signez un contrat, préparez-vous à la rupture » Aujourd'hui, la pression est accentuée », déplore Henri Stambouli, l'entraîneur du 19e de Ligue 2. Dans sa carrière, il a déjà subi les foudres présidentielles, les interruptions prématurées de contrat et la peur du vide. Mais le technicien istréen a trouvé la parade. « Je suis parti à l'étranger, dans les pays du Golfe, en Afrique noire et au Maghreb. Les techniciens français ont bonne réputation et ça m'a permis de rester en activité. »

La précarité de la fonction, le Provençal l'a testée grandeur nature au Vélodrome. « J'ai eu la chance de passer par l'OM, donc je suis vacciné. » À l'écouter, le FC Nantes n'aurait pas grand-chose à envier au poids lourd phocéen. « De l'extérieur, on parle du phénomène nantais. C'est un club qui part en vrille. C'est miné. Il y a des clans à droite, des clans à gauche, des anti ceci, des pro cela... » La valse des entraîneurs n'arrange rien à l'affaire. Baptiste Gentili, choix estampillé WK, entre ce matin dans la danse. Un détour par la salle vidéo s'impose. Des fois qu'on y projette 24 heures chrono.

Ouest-France